En 1982, en transit gare en Montparnasse, je tombe par hasard sur une revue parlant des premiers Dakar avec moultes histoires et détails croustillants. J’avais le permis moto en poche depuis 78, ma première moto a été un  Trail 125 AT1 Yamaha kitée en  175, puis une Suzuki GT 550. Mon activité de musicien pro avait mis un terme provisoire à cette passion motarde. Les quatre heures de train jusqu’à Metz suffiront à me permettre de dévorer cette revue et rempliront mon esprit de rêves d’aventures et de désert. Les Cyril Neveu, Auriol, Bacou, Vassard,  Rahier, Joineau, Merel, ainsi que tous les amateurs et poireaux seront désormais mes idoles. Tout le reste de ma vie ne sera que la suite de ce jour là.

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Épisode 1

1983. Parlant avec un ami musicien de ma passion pour la moto et le Dakar, celui-ci me suggère d’acheter une 500XT. Deux mois plus tard j’achète une magnifique Yamaha avec un kit 600 JPX (pour les initiés) à un jeune militaire qui part en outremer. Je lui fais 10 chèques de 1000 francs sans aucun apport (je ne le remercierai jamais assez)

1984. La 600 XT Ténéré bleue et jaune hante mes nuits. Je revends la 500XT et m’offre mon rêve. Très débutant en moto et tout de bleu vêtu, je croise un certain Laurent Vax tout en rouge sur une 600 XLR. La rencontre est explosive : il sera mon maitre et mon mentor pendant quelques années. Une certaine forme de Jo Bar Team version Trail (Impasse des vignes) nous a permis de passer d’excellents moments avec quelques gaziers forts sympas. Ensembles nous faisons nos premiers road-book papier au curvimètre sur des cartes IGN. Ceux-ci sont installés aux guidon avec de mini-dérouleurs. Nous écumons routes et petites routes de la région avec accessoirement quelques chemins et pistes très roulantes.

Ma seule expérience TT se résume alors à la lecture des aventures africaines des Dakariens, au livre de Gaston Rahier Le Pari Dakar et aux discussions informelles du Jo Bar Trail de l’impasse des Vignes.

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1985. Les (rares) images TV du Paris Dakar, les commentaires de Max Ménier sur RTL ainsi que Moto Journal et Moto Revue, me décideront à me lancer dans le grand bain de l’aventure. Personne autour de moi ne souhaitant m’accompagner, je trouve une petite annonce sur MJ : un certain Valérie Durin, tout juste rentré d’un trip en Afrique avec sa 550XT, organise une virée jusqu’à Tamanrasset. Le deal est clair, 10 motos, 2 Land Rover d’assistance et 10 kg de bagages maximum. Hop me voilà inscrit. Départ le 06 et retour le 26 novembre. Moulins puis Marseille et direction Tunis – El Oued – Toghourt – Hassi Messaoud – Hassi Bel Guebour – In Amenas – Illizi – Djanet – Serouenout – Ideles – Hirafok – Assekrem – Tam – In Amguel – In Ecker –  Amguid – Bordj Omar Driss et retour. Une boucle de 6000 km il me semble.

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La préparation de la moto se fait chez Jacomoto à Metz par François Cornevaux qui a fait le Dakar et même remporté le Rallye d’Algérie. Modification du filtre à air, meulage de l’intérieur du bras oscillant pour le passage des Michelin Désert, magnifique sabot alu de chez DS Products (Dominique Sauvêtre pour les connaisseurs), ligature des rayons et changement du boitier CDI sous garantie car les premiers avaient de réels soucis de panne. C’est arrivé le mois précédent mon départ….ouf j’ai eu chaud sur le coup là. La moto était fin prête.

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10 kg de bagages max a dit l’organisateur, soit pour la moto : un bidon d’huile, quelques petits outils, un pneu arrière, deux leviers, un guidon et c’est tout je crois. Pour le bonhomme : un équipement hiver que je laisserai à Moulins et un équipement cross (sans genouillères ni plastron, la jeunesse…). Dans mon sac à dos, 2 slips, 2 T-shirts, 2 paires de chaussettes, un jogging, un Jeans, une paire de baskets,  une serviette, un mini trousse de toilette, un sac de couchage et une plaque de mousse bleu de 10mm d’épaisseur. J’emporte aussi un appareil photo Fuji Baroudeur (excellent) et 10 bobines de diapos 36 poses Fuji 200ASA. Enfin, je prends une gourde et un bidon d’eau de 5 litres ainsi que la carte Michelin 153 de l’Afrique. Même pas une boussole dans tout ça ! Et bien les 10 kilos sont bien là, tant pis faut y aller, pas du genre à se dégonfler le père Jean Louis. Et puis les mecs du Dakar c’est bien pire, ils n’ont pas de sacs de couchage pour certains et il y en a même qui mangent dans le carter de leur moteur.  Si, si un certain Babu Steiner il me semble, toubib dans la vie…

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Le 04 novembre au matin, habillé comme un cosmonaute et par un temps assez clément (4-5°C) départ de chez moi à Thionville après de gros bisous à ma petite femme et mon fiston âgé de 18 mois. Deux copains vosgiens sont venus faire un petit bout de route avec moi : un 500 CB je crois et un 1100 Yamaha attelé d’un side 4 places (gloups). Les 600 km jusqu’à Moulins ne seront qu’une simple formalité, et je ne pourrai compter le nombre de signes de sympathie que me feront les automobilistes et autres passants dans les rues des villes et villages traversées.

J’étais très fier et heureux de partir faire mon « Dakar ».

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Jean-Louis Querel est un sacré bourlingueur. Fils et petit fils de marins Cap Hornier, c'était dur pour ce Breton de ne pas être attiré par le voyage. Mais lui c'est sur des bécanes qu'il naviguera. Sa première aventure - au guidon d'un Yamaha AT1- c'était en 1975. Il avait alors 20 ans... Et depuis il n'a toujours eu qu'une devise : "Trail and sand forever".
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33 Commentaires

  1. Aïe, tu appuies où cela fait mal.

    Ce que je n’ai pas osé faire à 20ans, par peur ou formatage sociétal et que je regrette.
    Merci.
    Vivement la suite.

    Philippe

  2. ah aha ..
    La boucle de Durin ,c’est en gros ce qu’on avait fait en 80 avec mes deux potes; sauf qu’après on avait tiré au sud, direction Niger , togo ghana et RCI .
    C’était la première étape . Après Afrique centrale et EST .
    la machine , la 500 , pas de CDI, pas de pneus désert
    la prépa avec DS aussi , moins affutée
    le gars Sauvetre avait du te causer des trois de 80 : JLuc, Jacques et Francis .

    • Hello ex-xt

      Merci pour ton commentaire, en 80 vous étiez des pionniers et des vrais, et puis vous êtes allé beaucoup plus loin et sans assistance donc beaucoup plus difficile et périlleux.
      Dans mon voyage, il n’y avait rien d’extraordinaire sauf le fait de réaliser un rêve et c’est bien là l’essentiel.
      Je n’ai jamais rencontré Dominique Sauvêtre, je le connaissais tout juste de nom à travers les revues.
      Au plaisir d’échanger avec toi à l’occasion.
      Amicalement
      Jlouis

  3. Argh!

    J’adore lire ces histoires, même si je suis toujours en contradiction entre:
    – l’envie de vite connaitre la fin,
    – et qu’elles ne s’arrêtent jamais…

    Philippe

    • @ Phil91 et Eric

      Merci pour vos commentaires, je peux si vous le souhaiter vous faire parvenir la version « originale longue de mon récit » ici pour des raisons d’édition les textes sont un peu raccourcis et il y a aussi plus de photos
      N’hésitez pas à m’envoyer un petit message via messenger et je me ferai un plaisir de vous répondre.
      Bien cordialement
      Jlouis

  4. Bonjour Jean louis ,
    C’est bien sûr par hasard que j’ai découvert ton récit ,
    c’est extraordinaire de le découvrir alors que tu viens d’écrire !
    je me souviens bien de toi et de chacun des participants .
    Ce voyage en a précédé bien d’autres …
    ( Je n’arrive pas à lire tous les épisodes . )
    On peut se contacter si tu veux , j’habite Limoges .

    • Hello Pascal

      Whaou….trop content de te retrouver là, je viens de t’envoyer un mail perso.

      Serais vraiment très heureux d’échanger avec toi nos souvenirs communs et autres.

      Dans l’attente de ta réponse

      Bien cordialement

  5. salut
    un plaisir de te lire. Comme je me retrouve dans tes moments de doute et de fatigue… mais tu sais, être jeune et faire ce raid, c’est inoubliable !!!!
    Je suis reparti en 2015 au Maroc, encadré assistance et tout et tout avec un dreuzz… paysages super, fatigue au top aussi, trop de bornes par jour
    en 2016 traversée de l’Espagne par les pistes la banane est revenue, super ambiance, un peu de progrès ( bof mais quelle machine cette sauterelle) . atteinte de ma limite ; 6 jours .
    si jamais tu passes dans les pyrénées , on pourra faire les vieux shnocks // ah ah
    ( fofo terre bitume)

  6. Merci pour ce commentaire passionné et passionnant
    Les souvenirs sont faits pour être partagés
    Il me plairait bien de te rencontrer
    Alors à un de ces jours
    Inch’Allah

  7. Merci pour ce moment de partage.
    C’est vrai qu’avec le temps on oublie qu’il y a 30 ans, les communications n’étaient pas les mêmes.

    Philippe

  8. Pffffh! Ch’ais même Pu quoi dire!!????
    « c’était Mieux AVANT »! NâââN, pas Forcément!……?
    Ch’uis CONTENT qu’t’es Revenu à la MOTO, Sans y être « Obligé »!!
    Simplement par Goût!??✌? À BIENTÔT!!! Ch’uis Impatient d’te Voir à Lyon!!!??? Pis on s’ra EN-FIN sur le Même Stand! Ou tout du moins sous les Mêmes COULEURS!!!?
    Mr Jean-Claude??, si tu nous Entends tu dois te Marrer……?

  9. Bonsoir Jean-Louis,

    Je ne sais quoi dire devant un si joli récit que j’ai lu d’une traite, merci pour cette aventure faite à une époque ou j’aurais rêvé de faire la même chose, mais je n’avais que 4 ans au moment !

    Mais je ne ratais jamais le passage du Dakar devant la maison quand j’étais minot, j’habitais juste en face de la N20 ! Camions, motos, voitures, tous faisaient de grands signes

    Je dédie ma vie aux voyages, mais je pense qu’a l’époque, tout était plus difficile que maintenant.
    Je dois attendre un peu, mais je devais partir cette semaine sur mon Road trip moto, il risque d’être décalé a l’année prochaine.
    Il se fera sans GPS et avec des cartes ! Moto de 1989, façon de faire de 1989 🙂 De Tarifa au Cap Nord.

    Merci encore,
    Peut être à un de ces jours sur la route;
    Amitiés,

    Dorian.

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