Qui dit hiver, dit le retour de l’éternel débat sur le « vrai motard », le roule toujours. Histoire de faire avancer le schmilblick, j’ai décidé de théoriser un peu la chose. Pour ça, je me suis basé sur l’échelle de Richter. Tu connais ? C’est le truc pour mesurer les tremblements de terre. Je me suis amusé à en faire une pour la moto. Au plus tu augmentes le niveau, au plus t’en chies. Par conséquent, au plus tu prendrais ta moto dans des conditions climatiques pourries, au plus tu serais un pur et dur. Allez, on essaye.

Le niveau 1, c’est fastoche. C’est quand il fait soleil, que les p’tits zoiseaux chantent et que la vie est belle. Là c’est facile de rouler le nez au vent. C’est le moment où sortent tous ceux que l’on appelle péjorativement les « motards du dimanche ». C’est débile d’ailleurs de dire ça. Les motards qui roulent au niveau 1, ce sont surtout ceux qui possèdent une voiture pour les autres météos et qui ne conçoivent la moto que comme un moment de détente. Je respecte leur choix. Faut juste pas tomber dans la tentation du kéké des plages qui – soleil oblige – roule en short et tongues. Mais là, je te parle de motard(e)s, donc ce n’est pas le sujet.

Vient ensuite le niveau 2. C’est quand tu sors ta moto même quand il fait du vent. Ben oui, quand comme moi tu viens du pays du Mistral, tu sais que c’est une vraie cochonnerie : ça te fait faire des écarts de deux mètres. De face ou dans le dos c’est gérable. Mais en latéral tu serres les fesses tout le long. Surtout qu’il suffit que tu longes une haie pour qu’il n’y ait plus rien et paf, 10 mètres plus loin tu te fais balayer comme un fétu de paille. C’est vicelard comme pas possible le vent.

Le niveau 3, c’est tout le contraire. Faute de courant d’air, toute l’humidité est restée là, en suspension et ton copain le brouillard s’est pointé. Tu as beau écarquiller les yeux comme une chouette, impossible de voir à plus de deux lignes blanches devant toi. Tu roules donc tous les sens en alerte. C’est hyper crevant et tu galères pour finalement avancer… comme une larve. Le gros souci dans cette situation, c’est les autres, ceux qui ne verront ton p’tit feu arrière qu’au dernier moment. Les yeux dans le dos sont indispensables si tu t’attaques à ce niveau.

Arrive la pluie avec le level 4. Aquaplaning sur les freinages, aucune adhérence dans les virages, et visibilité pourrie. Un vrai calvaire, en ville comme à la campagne. Et en plus, lorsque l’eau finit par transpercer ta carapace (il y a toujours un moment où elle y arrive), c’est ultra désagréable. Sans compter que tu as l’air fin au taf avec un « string » de flotte dessiné à l’arrière de tes fesses.

Enfin, dernier stade, la chute de neige. Là tu as le big combo du froid qui te transforme les doigts en bâton de Yeti, la visibilité proche de zéro à cause de la poudreuse qui vient s’éclater sur la visière de ton casque et bien sûr l’absence absolue d’adhérence. Dans ces moments là, prendre ta moto, c’est un peu comme si tu te disais : « Tiens, j’irais bien nager avec des crocodiles aujourd’hui ». C’est bien plus dark que 50 nuances de Grey en terme de plaisir masochiste. Et pourtant, quand je vois les centaines de motard(e)s se pointant la goutte au nez sur les hivernales enneigées, je me dis qu’on est un paquet à aimer l’auto-flagellation.

En fait. Au plus j’y réfléchis, au plus je me dis qu’il n’y a qu’un niveau qui compte, qu’un seul qui détermine ta motarditude : celui de la passion. Si ton kif c’est de ne rouler qu’aux beaux jours ben t’as bien raison. Inversement, si comme moi tu prends autant ton pied en faisant des grands écarts sur les plaques de verglas qu’en roulant un soir d’été sur une petite route de campagne, grand bien t’en fasse. Le reste, on s’en fout.

Fais ce qui te plaît et surtout roule quand ça te chante. L’essentiel, c’est d’être heureux au guidon.

Article publié dans le Moto News Magazine de Février 2016

9 Commentaires

  1. Moi je change de niveau en fonction de l’envie..
    Mais j’avoue que ma 1ere hivernale (mille vaches) l’année dernière j’étais pas peu fièr 🙂
    Je peux enfin me dire « je l’ai fait »

  2. Bien d’accord, c’est le niveau de passion qui compte! Mais il y a des moments ou rouler en becane est une obligation …
    Quand la voiture refuse de démarrer parce qu’elle couche dehors par -10°C, alors que la becane bien au chaud démarre.

    Quand tout jeune permis tu n’as pas encore assez de ronds pour te payer une caisse mais juste assez pour rouler sur une vieille 125

    Pour avoir testé ces cas là et d’autres, je dois reconnaitre qu’aujourd’hui que j’ai le choix ma passion n’excède pas le niveau 2 sauf si je me fais surprendre en cours de route par une météo pourrie.

    Quoiqu’il en soit, respect aux « roule toujours », qu’ils y soient obliges ou non
    V

  3. précisons que le yeti prend l’appelation mister freeze…dés que tu depasses la loire
    un peu comme la chocolatine qui n’existe pas en vrai dans l hexagone sans accent chantant..

    bon sinon perso j’aurai mis le brouillard en niveau 4 …rouler sur le mouillé.. ca peut meme me donner une petite fierté de cake genre… j suis un vrai un dur…
    rouler dans le fog… ça me rend tres tres humble…

  4. Après la pluie (ce qui est normale dans le nord) et avant la neige tu as le niveau il fait beau mais -10° et j’ai les doigts bleus (ce qui est normal dans le nord)

  5. Coucou.Je roule par tous les temps sauf neige et verglas.Ce WE,roulé avec le soleil en face pendant une heure,visibilité aléatoire mais pas question de renoncer.Je crois qu’un motard c’est quelqu’un qui a du plaisir en roulant,et on a pas tous du plaisir au même niveau.Quelqu’un qui n’a jamais skié que sur des pistes rouges c’est un skieur quand même,non?

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