Ça fait un bout de temps que j’essaye d’écrire cet article. C’est un sujet complexe et pas facile à aborder. Pour faire court, il y a un mois j’ai rompu mon deal avec Honda et je vais essayer de vous expliquer pourquoi. Il ne s’agit pas ici de remettre la faute sur quelqu’un en particulier, mais plutôt d’expliquer simplement et ouvertement les faits qui m’ont amenés à prendre cette décision.

J’étais à Oulan-Bator en Mongolie, avec une bonne dose d’anti-inflammatoires dans le sang la première fois qu’on m’a dit qu’Honda s’intéressait à mes aventures. Je peux vous dire qu’à ce moment-là je me voyais déjà faire le Dakar. J’ai rapidement repris mes esprits : trop fou pour être vrai ! Sauf que la petite graine a germé… Et si je pouvais être soutenu par Honda ?

Début décembre, on m’invite au salon de la moto de Paris. C’est l’occasion de rencontrer le responsable Honda à qui j’avais finalement envoyé une présentation de mon futur projet de voyage : suivre les traces des Paris-Dakar d’antan ET d’aujourd’hui. Dix mois en quête d’aventures, avec la ferme intention de venir en aide à des projets écoresponsables tout au long du périple. Le respo semble emballé. Et juste avant Noël le verdict tombe : le projet est validé, ils me prêtent une Africa Twin ! Un sacré cadeau de Noël : J’avais le soutien financier, matériel et social de Honda !

Quelques semaines plus tard – pile pendant le Dakar 2016 – je leur écris pour leur partager ma joie et j’en profite pour poser quelques questions. Ben oui, j’ai monté mon projet en imaginant qu’ils pourraient m’aider de telle ou telle façon. Mais, concrètement parlant, je ne sais pas encore ce qu’ils peuvent vraiment me proposer et attendent de moi. Mes questions portent sur l’assurance de la moto, l’assistance mécanique et l’aide au niveau du transport vers l’Amérique du Sud. Un mois plus tard, la réponse est plutôt claire, ils me prêtent la moto, me donnent un beau chèque pour couvrir les frais et pour le reste je dois me débrouiller. Je sais que c’est déjà énorme mais je m’attendais naïvement à moins de pognon et plus d’implication dans les démarches « logistiques ».

Au cours d’une réunion j’apprends que la moto ne sera prêtée « que » pour un an et ne sera pas à mon nom. C’est logique mais je n’y avais pas pensé plus tôt. Je m’informe sérieusement sur le sujet : il s’avère complexe de circuler avec un véhicule qui n’est pas à son nom, spécialement en Amérique du Sud. J’en avise rapidement Honda et j’émets l’idée d’avoir un accord avec leur filiale en Amérique du Sud. Pas possible. Bon…

Je prends rapidement conscience que tout n’est pas acquis. En prime je dois trouver une solution pour l’assurance (sur les trois continents), le transport et le planning (pour être à la bonne saison dans chaque pays). Il y a un énorme décalage entre ce que j’imagine possible et ceux qui l’est réellement. Je crois que j’ai voulu voler trop haut mais je reste optimiste. Je rumine jusqu’en mars.

Complètement paumé, je me fais embarquer par des potes pour une semaine au ski, parfait pour se changer les idées. Je déciderai après. Au retour je me pose quelques jours pour réfléchir. Le verdict est simple, ma mère avait raison depuis le début, j’aurais dû l’écouter, et réfléchir sérieusement à ce qu’elle disait : Ne pas me fourvoyer.

Je réalise alors que depuis le début, je contredis les trois grands principes que beaucoup de baroudeurs appliquent à la lettre :

Plus c’est simple, mieux c’est.

Pour être serein, il faut connaître ton destrier sur le bout des doigts !

Et mon préféré pour terminer :

Plus ça brille, plus ça attire !

Avant le ski j’ai essayé l’Africa Twin chez un concess comme n’importe quel client lambda. Je l’ai rendue avec le sourire jusqu’aux oreilles. J’ai adoré broyer la poignée sans me sentir en insécurité, même dans les petits chemins glissants. J’ai adoré toucher par terre, ne pas trop en suer pour rouler au ralenti. Tout donnait envie sur cette moto. C’était encore plus dur de lacher Honda et l’Africa Twin. Mais je l’ai finalement fait dans un mail assez long et explicite. Voici la version courte :

– Les papiers de la moto ne seront pas à mon nom. Cela me contraint à établir un document (Power of Attorney) avec chaque consulat des pays traversés pour, peut-être, réussir à y circuler.

– Le rapatriement depuis l’Amérique du Sud n’est pas possible et des frais importants peuvent être engagés en cas de problème.

En conclusion, le projet en Amérique du Sud avec l’Africa Twin n’est plus viable à ce jour.

Je me suis senti libéré d’un poids énorme. Je m’étais fait à l’idée que ces contraintes étaient normales et bénéfiques au projet. Petit à petit j’ai été séduit par l’opportunité de rouler sur une moto neuve, d’être mieux considéré dans le monde de la moto, d’être un peu plus connu, de gagner en crédibilité. Mais franchement est-ce bien utile ? Est-ce en adéquation avec ma philosophie du voyage ?

En voulant rentrer dans la cour des grands je me suis heurté à des problèmes qui dépassent tout ce que je pouvais imaginer. Vous allez dire que je suis un ingrat, que j’aurais dû accepter l’énorme cadeau qu’Honda me faisait, que les machins administratifs ça se solutionne. Mais c’est plus compliqué que ça, ça va au-delà de ça. C’est un « sentiment », une « sensation » qui est ressortie de toute cette histoire qui ne m’allait pas. Je n’ai pas beaucoup de reproches à faire à Honda, c’était peut-être trop tôt. Je suis certainement encore trop utopiste mais pour moi un partenariat c’est avant tout un partage de passionnés.

Au final, je n’ai qu’un conseil à donner : écoutez votre maman !

Je m’envolerai bientôt pour l’Amérique du Sud avec ma nouvelle monture, un vieux machin retapé ces dernières semaines. Retrouvez toutes les infos sur mon blog www.laventurierviking.fr. Et surtout gardons les pieds sur terre en restant… des rêveurs.

14 Commentaires

  1. Hello m’sieur le viking. Tu dis « je crois que j’ai voulu voler trop haut », peut-être, mais est-ce que c’est une obligation quand on veut voler loin ? Une chose est sûre, on te suivra dans tes aventures avec autant de plaisir quelle que soit la monture. Parce qu’un viking rutilant ou poussiéreux, bah c’est toujours un viking !

    « Plus c’est simple, mieux c’est. »

  2. Juste avant de partir en Afrique à moto, 2 marques m’ont proposé leur bécane. J’ai décliné pour les mêmes raisons que toi : l’administratif en Afrique aurait été compliqué, et j’avais préparé ma moto depuis des mois pour ça, je la connaissais par coeur.
    Et en fait, je pense que j’ai pris plus de plaisir et de fierté à l’avoir fait seul, par mes propres moyens.

  3. Une aventure, un rêve, est bien plus apréciable quand on est libéré d’un maximum de contraintes. Si signer avec Honda voulait dire garder en tête tout le long de la route « et si j’ai un soucis avec leur moto je fais quoi », le plaisir n’aurais pas été le même.
    J’espère que tu vas t’en mettre plein les yeux !

    Un motard admiratif. 🙂

  4. Ton choix reste tiens et je pense que tu as suffisamment pesé le pour et le contre ….
    Puis même si ta maman ne le sentait pas ce n’est pas pour rien ^^

    Vivement le départ pour suivre l’aventure d’un rêveur 😉

  5. Vous êtes gravement décadents sur ce site !
    Et ce post est un sommet.
    Et ceci est le sommet de ce post : « avec la ferme intention de venir en aide à des projets écoresponsables tout au long du périple ».
    Oh les jeunes réveillez vous sinon vous allez finir djihadistes pour trouver la paix des neurones.

  6. Tu as bien fait de préserver la simplicité (et la tranquillité d’esprit). Je pense que c’est plus (lire +) Honda qui est perdant au final alors que tu demeures ce que tu es !
    J’admire.

    Je manque de co..lles pour vivre mes rêves ou simplement mes envies mais j’adore rouler, seul, en duo, en troupeau avec des potes…

    Longue route l’Aventurier Viking !

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