Ça a commencé par un mail de Cigalou. Ça commence toujours par un mail de Cigalou. Le barbu t’envoie un innocent petit « coucou », et avant que tu ne comprennes comment ou pourquoi, tu te retrouves dans la boue jusqu’au pot, ou à refaire un carter en mode manouche Mac Gyver au milieu de nulle part. Si tu me crois pas, tu verras sur la rando qu’il organise mi-novembre, quand tu seras dans la neige, avec un cache-œil, un crochet à la place de la main et une jambe de bois… Tu te demanderas ce que tu fous là. Mais pas longtemps hein, rassure-toi. Pas longtemps, parce qu’il faudra bien désembourber ta brêle, et que tu auras besoin pour cela de toutes tes capacités cognitives. Et aussi parce que finalement, tout bien considéré, après tout, et bien pourquoi pas ? On n’est pas bien là, à la fraîche ? Et c’est vrai : les plans de Cigalou, ils sont toujours complètement improbables, du genre qui te font lever un sourcil et baisser l’autre, mais jamais foireux. Ou pas trop. Juste ce qu’il faut quoi. Après coup, tu n’en retiens que de purs moments de franche rigolade, de belles rencontres et de nouvelles découvertes.  

Bref, c’est comme ça qu’a commencé la genèse de ce texte. Par un mail venu du lointain Sud. Cigalou me demandait si je ne voulais pas me rendre à Automédon, pour en rapporter un petit compte-rendu et quelques images, « vu que t’es à Paris, que tu n’as pas de copies à corriger toute la sainte journée, et que donc t’as plein de temps à tuer, vas-y, file. » Alors je lui ai dit « Ha bon ? ». Et là il m’a répondu « baaah oui ». Alors j’ai dit « baaah ok ».

Et voilà. Me v’là missionné pour aller où ça au fait ? A Automédon. Comme je n’avais jamais entendu ce nom-là auparavant, j’ai commencé par consulter les plus grands savants pour en savoir plus. Oui : Google, Wikipedia, tout ça. Alors Automédon, c’est le nom du fils de Diorès, dans la mythologie grecque. Il était originaire de l’île de Skyros et c’est lui qui conduisait le char d’Achille pendant la guerre de Troie. Kikipédia précise même que son nom est passé dans le langage courant, un « automédon » désignant un bon conducteur d’attelage. Bon à ce stade, je n’étais pas trop avancé sur ma destination, et même si cette notion d’attelage m’évoquait un vague rapport avec le side-car, je me doutais quand même que j’étais sur une fausse piste.  

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En poussant mes investigations, j’ai réalisé qu’Automédon, c’est surtout un salon consacré aux véhicules de collection, principalement voitures mais également un peu motos, et qui se tient chaque année au Parc des Expos du Bourget. Et ce depuis 16 ans. 16 ans ? Et pourtant, vraiment, je ne crois pas en avoir entendu parler auparavant. Honte sur moi. Bon il faut dire que je ne dois pas être dans la cible. J’ai bien eu de belles collec’ de timbres et de pin’s quand j’étais tout gamin, mais je suis finalement assez peu sensible à la collectionnite. Parce que oui, il s’agit ici de collection, de restauration. Pas du tout de prépa ou de néo-rétro. On entre dans le monde de ceux qui parlent de patrimoine roulant, faut que ce soit dans son jus. Ça pisse l’huile ? Oui mais ho, c’est de l’huile d’origine de 1948, on ne met pas de la synthèse là-dedans, sent moi ça c’est de la bonne.

Direction le Parc des Expos donc, en ce weekend end du 8/9 octobre, pour en savoir plus sur ces passionnés d’anciennes, à deux ou quatre roues, qui les restaurent patiemment dans l’ombre de leur tanière et se retrouvent sur ce genre d’évènement pour partager le fruit de leur labeur avec le plus grand nombre. Et aussi pour trouver LA pièce qui leur manque, LE boulon de 14 taraudé par Peugeot en 1934 et sans lequel leur vénérable machine ne pourra reprendre vie.

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La première chose que l’on remarque en arrivant sur place, c’est … le parking. Bah oui il faut bien garer le brêlon. Sauf que d’habitude, sur un salon, tu jettes ta moto dans un coin et tu te rues à l’intérieur pour arpenter les allées. Là, non, le show commence à l’extérieur : tous les visiteurs qui sont venus au volant ou au guidon d’anciennes sont invités à se garer sur un immense emplacement qui leur est réservé. Pas moins de 2 500 véhicules s’y trouvent, tous styles et époques confondus. Beaucoup de monde flâne dans ce coin-là ; en famille, en couple, en solo, ça discute, ça tourne, ça prend des photos, ça met des petits coups de pieds dans les pneus d’un air connaisseur.

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Le visiteur découvre ensuite un village de stands, véritable marché aux puces qui propose pléthore de pièces d’occasion improbables et qui fait le bonheur des amateurs de restauration. Des kilomètres de pots d’échappement, des montagnes de phares, des autoradio-cassettes à la pelle, des deux-chevaux désossées, du rétroviseur en alu, en inox, en acier, en bois, en mousse, en veux-tu en voilà. Des boulons par millions, présentés en vrac dans des bacs, et dans lesquels de curieux personnages plongent avec gourmandise à la recherche de la perle rare. Ces mecs-là, quand le vendeur leur demande s’il peut les aider, il ne faut pas s’attendre à une réponse courte, non. Tu as le droit à toute la genèse de son projet, toute l’histoire des véhicules possédés par sa famille sur cinq générations, justifiant par A+B la recherche de ce pointeau de butée du culbuteur de circuit de refroidissement des essuie-glaces « modèle 1952 bien sûr, ceux d’après ne valent rien, et puis comme tu le sais ils en ont arrêté la production en ’54. » Bref, il met 2 plombes à expliquer ce qu’il cherche, réajuste sa lampe frontale et replonge tête la première dans un océan d’acier. Finalement, ça donne une chorégraphie assez chouette, tous ces grands enfants qui arborent un large sourire et qui touchent, tâtent, fouillent et retournent les stands. Qui s’émerveillent devant ce qui devait être une moto avant de passer quelques décennies sous un tas de paille au fond d’une grange, tandis que certain(e)s s’égarent du côté des vendeurs de meubles vintage et autres cylindres montés en lampe.

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Il est temps de s’aventurer à l’intérieur, au cœur du salon. 300 exposants et 200 véhicules y sont présents. Beaucoup de choses sont à l’honneur, surtout sur quatre roues. Liste non-exhaustive : les véhicules historiques du Rallye de Monte-Carlo, les Citroën de Sébastien Loeb (9 fois champion du monde des rallyes, faut-il le rappeler), les nombreux véhicules provenant de collections privées et ceux présentés par les différents clubs. Aperçus également, les 20 caravanes et autres camping-cars vintage du Rétro-Camping Club de France, qui fête ses 20 ans. Ceux-là proposent de suivre l’évolution des aménagements, des matériaux utilisés ou de la décoration. Ça sent bon les vacances, on est plongé dans l’ambiance du camping des flots bleus et des bouchons de la N7On aperçoit bien sûr de vieilles et non moins jolies guimbardes, comme celle de Gaston Lagaffe, mais certainement mieux entretenues. Le visiteur tombe également sur de vraies perles dont on ne soupçonnerait pas la présence en ces lieux, un bateau par exemple. Oui, un joli petit bateau à moteur tout en bois, style Riva pour les amateurs de belles choses flottantes. Ou bien une moto un peu bizarroïde et encore recouverte d’une solide croûte blanche après une tentative de record de vitesse sur lac salé, là-bas, aux States.

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En arpentant les allées, je suis plusieurs fois tenté d’aborder les exposants, histoire d’en savoir plus sur telle ou telle présentation, malheureusement plusieurs stands sont assez peu accueillants. C’est là le point noir de ce salon selon moi : nombreux sont les exposants qui sont en plein buffet – apéro entre potes sur leur espace. C’est sûrement l’heure de ma visite qui veut ça (11h – 15h …), mais on a quand même le sentiment de les déranger entre trois bouteilles et deux saucissons, en osant s’approcher d’un peu trop près. Quand à chercher du regard un éventuel responsable disponible pour répondre aux questions, c’est mission impossible sur la plupart des stands … Dommage.p1050272

Dommage, mais du coup je ne suis pas trop retardé dans ma quête de bécane, histoire de ne pas oublier pourquoi on est là. Parce que oui, à Automédon, il y aussi des motos. Les deux-roues ont même leur espace dédié dans un coin du salon, Motorama, avec l’idée d’y retracer l’histoire de la moto en présentant certains modèles emblématiques de leurs époques respectives, ou qui se sont illustrés lors de courses légendaires. Vaste ambition, d’autant plus que l’espace dédié n’est pas immense, mais le pari est toutefois remporté, tant les modèles uniques et parfois mythiques y sont présents, entourés de clubs, préparateurs, artisans et autres associations motardes.

On y trouve par exemple 35 splendides italiennes, qui ont brillé sur de nombreux podiums avant d’exposer impudiquement leurs courbes ici. Ducati, MV Agusta, Benelli, Guzzi, Vespa, Rumi, Lambretta, Aermacchi… Rares sont les occasions d’admirer ces machines, absolument uniques et résolument … rouges. Un peu plus loin, un autre podium propose de baver devant les destriers des plus valeureux gladiateurs des 24 heures du Mans. L’écurie Gérald Motos y a rassemblé de véritables machines historiques, certaines plus récentes que d’autres, notamment la R1 du team GMT 94, championne du monde 2014 avec David Checa, Kenny Foray et Mathieu Gines, ou bien cette autre Yam’, celle des frères Sarron. Une dernière zone est consacrée aux anglaises de caractère (pléonasme), avec une vingtaine de vénérables machines, surtout des Triton et Triumph, ainsi que quelques Royal Enfield. Une belle surprise pour moi, j’avoue être toujours séduit quand je me trouve face à une Triton. Pourquoi ? Aucune idée, ça ne s’explique pas ces choses-là, c’est subjectif. Ces motos ont un charme certain, une bonne bouille … C’est comme ça. Je n’ai jamais eu la chance d’en piloter une, ni même d’y poser mon séant, pourtant je fonds chaque fois que j’en croise une. Et j’en croise rarement.p1050271

La découverte de ce salon fut une expérience enrichissante, pauvre néophyte du monde de la collection que je suis. On y croise des gens vraiment passionnés, qui ont à cœur de conserver, entretenir, et surtout faire rouler des pièces uniques de l’histoire automobile et moto. Ils sont fiers de préserver un patrimoine et de valoriser des savoir-faire, parfois disparus aujourd’hui. Certes, il fallait venir en dehors de heures de repas pour une totale interaction avec les exposants (j’en remet une couche, oui) mais l’évènement fut toutefois fort sympathique. 17 000 visiteurs ont d’ailleurs arpenté les allées du salon lors de ce weekend, signe d’un vrai engouement du public pour les anciennes. Un des points fort de l’évènement est selon moi le parking dédié aux anciennes appartenant aux visiteurs, qui participent ainsi pleinement au show qu’ils sont venus voir et à la richesse du salon.

Chère lectrice, cher lecteur, si tu kiffes les vielles (oui, il fallait faire cette vanne), n’hésites pas à faire un petit tour à Automédon l’année prochaine.

PS – La rédaction de compte-rendu d’un salon n’est pas un exercice facile. Du coup, plutôt que de faire un inventaire exhaustif et rébarbatif de tout ce qu’on peut voir sur l’évènement, j’ai surtout souhaité faire quelques photos pour en retranscrire visuellement l’ambiance. C’est plus simple. Pas con le mec. Sauf que non, je me suis rendu compte de retour chez moi que la grande majorité des photos prises sont foirées. Surtout celles de moto, c’est ballot. Quand on ne maîtrise pas encore un appareil neuf et qu’on tente des réglages improbables … Bref. Toutes mes confuses pour le trop petit nombre de clichés de motocyclettes présentés ici.

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