Avec Botan on vous avait promis que tous les mois on vous présenterait un nouveau personnage de notre bande-dessinée en chantier, l’occasion aussi de faire un peu le point sur ce « dossier ». On commence donc avec le personnage principal de nos aventures de papier : Barbapapa.

Barbapapa, contrairement à ce que son surnom pourrait le laisser croire, n’a pas encore atteint la trentaine. Ses amis lui ont attribué ce pseudonyme en raison de sa barbe chérie et de son style de conduite de daron asthmatique. La vitesse, c’est pas son truc. Mais pas du tout. D’ailleurs, il a opté pour un mono plafonnant aux limitations, c’est dire. Lui, ce qu’il aime, c’est balader les poils du menton au vent sur son tromblon vintage. Engoncé dans son petit cuir bien cintré, il est un véritable aventurier des grands-boulevards. Osons le mot, Barbapapa est un peu (beaucoup) hipster. Mais bien sûr, il ne le reconnaîtra jamais.

Titi-parigot par excellence, ce n’est pourtant pas sur un café-racer ni sur un scrambler qu’il évolue au quotidien mais au guidon d’un authentique Honda 600 XL-RM de 1987 parfaitement dans son jus. Je ne te cacherai pas qu’il a bien été tenté de lui foutre un coup de meuleuse et un phare rond mais heureusement pour cette brave machine, Barbapapa est la pire des tanches en mécanique. Du coup, il se prétend « youngtimer » en se la jouant puriste. Peu coûteux en entretien et en assurance, ultra-maniable, ce XL est surtout idéal pour ses trajets urbains. Et puis bercé par le lent battement de son gros mono, Barbapapa se laisse aller à chaque feu rouge à rêver de grands espaces, de Paris-Dakar en images sépias et de cambouis sur ses mains trop propres. . Cela dit, il se risque de temps en temps sur les chemins. Il faut dire qu’avec ses 150 kilos tout mouillés, ce XL a de quoi en faire voir de toutes les couleurs aux patauds maxi-trails d’aujourd’hui. Enfin « aurait » plutôt, si son pilote était capable de franchir une ornière sans se mettre au tas. Mais ça lui suffit pour avoir la sensation d’être un « vrai ». Avec son trail, chaque dos d’âne lui semble être une dune, chaque caniveau un gué à traverser. C’est comme quand il raconte à ses copains qu’il peut lancer d’un savant coup de kick son gros moulin. Sauf que dans la pénombre anonyme de son parking, Barbapapa est bien content d’appuyer discrètement sur son démarreur électrique tous les matins. Le vintage c’est beau, mais le progrès a aussi ses petits avantages.

Bien sûr tu es en train de te dire que ce Barbapapa ressemble beaucoup à ce bouffon de Cigalou que tu lis toutes les semaines. Je ne vais pas te le cacher que je me sens assez proche de ce personnage et les gags dans lesquels je le mets en scène sont souvent tirés de mon propre vécu. C’est donc normal qu’il soit un peu le personnage principal de nos strips. Comme je suis prêt à mettre ma main a couper que Paulo les Gaz est le double de papier de Fane. Bien sûr, Barbapapa reste un personnage fictif, plus caricatural (j’espère) que moi. C’est l’avantage d’être en papier.

Lui il peut être un pur parisien qui ne cherche pas à tout prix à rentrer dans son Sud natal. Il peut rouler en jet et se la jouer hipster alors que j’angoisse pour mon menton. Bon ok, comme moi, il confond un carbu et un carter. Par contre, il a peur de la boue alors que je compte les jours avant ma prochaine session tétines. Et puis surtout, ce soir, alors que j’écris ces lignes en regardant le dessin de Botan, il me sourit joyeusement. Moi, je n’y arrive pas. Il faut dire qu’il ne vient pas de perdre son jeune cousin dans un absurde accident de métro. Il ne pleure pas. Lui. Il est en papier.

Mais Barbapapa me console à sa façon, il me permet de m’évader loin de ma triste réalité. Ce soir, je voulais trouver un prénom à notre héros pour compléter son portrait. Il me fallait un truc qui sonne bien parigot, qui transpire la vie, la bonne humeur et l’insouciance. Je n’en vois qu’un. Celui de mon cousin. Lucien.

Les héros de bande-dessinés ne vieillissent jamais car ils vivent dans nos rêves.

***

Lulu

2 Commentaires

  1. Depuis quelques temps, j’ai pris « du retard » dans mon suivi du blog. Non pas que je me sente obligé, mais j’aime bien venir ici, farfouiller, écouter, participer… C’est un peu comme un café motard avec de vieux fauteuils en cuir, et un ateliers en arrière salle. Mais ça me coûte moins cher en bière!
    Je profite donc d’une crise de procrastination pour délaisser mais obligations étudiantes et rattraper le train de l’actualité. Il suffit de voir comme j’ai trusté le classement des « commentaires récents » depuis deux heures.

    Aux premières lignes du portrait de Lucien, comme tous ceux qui commencent à connaitre les lieux, je trouve l’alter ego de ce que j’imagine être Cigalou. Version un poil édulcorée bien sûr. Un sudiste, ça reste sudiste toute sa vie!
    Sourire.

    Arrive la fin du post et la mise en perspective du personnage et du modèle réel supposé.
    Par un mécanisme de transfert sans doute, et aussi par humanité j’espère, j’ai envie de te manifester mon modeste soutien. 2 mois plus tard, derrière mon écran et à 800 bornes de là…
    Je suis surtout touché de voir qu’à travers ce support de passion tu partages avec nous quelque chose de si fort et si intime.
    La preuve – mais était-ce bien nécessaire? – qu’ici ce n’est pas truqué, qu’on n’a rien à vendre et qu’on ne cherche rien d’autre que partager.

    Courage donc et, j’assume la répétition, bravo et merci pour cet espace si agréable.

    • Merci Andy,

      En effet, je ne me sentais pas de faire comme « si de ne rien était ». Écrire a toujours été un besoin pour moi, dans les moments de joie comme de peine. Dans une vie de motard il y a des instants merveilleux, mais ça reste une vie avant tout, avec ses épreuves, parfois très éloignées de notre passion mais qui l’impactent d’une manière ou d’une autre. Partager cette situation absurde, cette douleur, avec vous m’a semblé naturel. Je vous sais bienveillants, solidaires. Je me sens bien sur ce petit site, avec « mes » lecteurs.
      J’avais juste envie de vous dire ce soir là que j’étais… terriblement triste. Comme on le raconte à ses potes autour d’une bière dans ce café imaginaire auquel tu fais référence.
      Et poser ces mots sur le papier (puis sur le clavier) ça m’a aidé à surmonter tout ça. Vraiment.

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